La famille de papa

J'ai récemment récupéré une boite de photographies provenant de ma grand mère paternelle. Je dois avouer ne pas bien connaître ma famille puisque j'ai grandi entre Maroc, Allemagne et Bordeaux alors que la famille était répartie entre Lyon et la Haute Savoie ce qui ne facilite pas les réunions de famille. Au rythme d'une rencontre tous les trois ou quatre ans il n'est pas bien facile de lier des liens. Accessoirement, la génération de mes arrière grands parents n'a pas vraiment été épargnée par la guerre de 14 et, entre les morts au front et ceux qui n'ont pas fait long feu après leur retour, poumons mités par les gaz, et je n'en connaissais que des photos jaunies sur les murs des chambres de la maison familiale accompagnée des décorations remises pour leur faire oublier leur jeunesse perdue et leur vie gâchée. . Entre le fait qu'elles ont passé quelques décennies dans une maison quasiment abandonnée et non chauffée et l'allergie de ma maman pour tout ce qui est ancien (ce n'est pas d'elle que je tiens mon penchant pour la collection et les brocantes), elles sont toutes passées à la benne quand nous sommes venus nous installer dans cette maison vers 1971. A l'époque je m'en fichais mais je regrette maintenant ce "sacrilège".

Papa

Un père (Antoine) savoyard qui a dû aller à Lyon pour ses études et une mère (Rose) lyonnaise. Il a manifestement grandi entre ces deux pôles.

Tour Fondue 1932. Selon Wikipédia c'est à coté de Hyères

Marseille 1932.

Septembre 1934. Dans la vigne. Je en sais pas qui est le moustachu mais il me semble reconnaître le "sourire" de la tante Calloux et la jeune fille de profil doit être sa fille la cousine Germaine 

Sur la pompe qui alimentait le ferme familiale en eau. Elle à été refaite plus tard avec un gros bloc de maçonnerie crépi dont ne sortait que le robinet sur lequel il fallait presser pour que l'eau coule. Dans la mesure ou l'eau arrivait sous pression à la pompe qui était à 20 mètres de la maison je n'ai jamais bien compris pourquoi la maison n'avait pas été raccordée directement au réseau. Sûrement une histoire d'argent impossible à sortir (les anciens n'étaient pas radins, ils étaient juste pauvres avec une ferme trop petite et plus de bras pour la faire tourner)

Août 1935. Devant la ferme. Je ne reconnais que papa (sans la date au verso ça pourrait être moi)

Baignade je ne sais ni où ni avec qui. Peut-être le frère de mémé ? Mémé est en maillot noir et en regardant papa je sais d'où je tiens mon physique de colleur de timbres :-)

Chasselay mai 1935. Sérieux avec sa cravate. En fait, je crains que le plus gros obstacle entre pépé et mémé ait été l'envie de bourgeoisie et de respectabilité de mémé quand pépé était plus "rustique". Maman racontait avec regrets la fois ou au milieu de la place Bellecour mémé lui cassait les pieds en lui expliquant que ses enfants n'étaient pas éduquées comme "des gens comme il faut" (essayez d'éduquer dans le respect des convenances citadines trois enfants sur une base aérienne d'Afrique du Nord ou il n'y avait rien à casser et ou l'agrandissement du jardin demandait juste un peu de muscle pour taper dans les stocks des plaques métalliques perforées utilisées pour la construction rapide de pistes d'aviation et accessoirement, pour clôturer les jardins) au bout d'un moment, maman s'est arrêtée, a regardé sa belle-mère et lui a asséné : "Les gens comme il faut me cassent les pieds !"

Oyonnax septembre 1933.

Là, ça sent l'appartement lyonnais : le carrelage était une denrée inconnue  dans la ferme

Papa et mémé Rose

On pourrait utiliser pour illustrer les aventures d'Huckleberry Finn

Pont de la Golette août 1933. Papa, Germaine et tante Calloux.

Août 1933

Août 1933

Aime janvier 1937. Mémé avait pris la gérance d'une épicerie qui devait être une "Étoile des Alpes" à Aime en Tarentaise.

Avril 1937, Aime chemin de la Plagne.

Septembre 1939 Jules, Rose, Auguste, Mireille, Roland

Du coup, on ne sait pas si Mireille est la petite fille ou la dame à droite

Photo posée chez un pro. Papa, mémé, je ne sais pas qui est la jeune fille à droite.

Un costard très "zazou". Je n'ai pas abordé le sujet avec papa mais les zazous étant fort mal vus par les autorités de Vichy (voir Wikipédia) ce genre de tenue et le comportement qui allait avec ont sûrement eu une influence sur la décision de mémé Rose de l'envoyer à Oyonnax pour que son oncle le mette "à l'abri" dans un maquis.

Papa et pépé 

Été 1954. Le petit chemin sur le coté de la maison faisait un superbe terrain de boules à l'ombre. Le remembrement passera par là avec un massacre de la haie pour laisser passer les moissonneuses batteuses qui ne l'utiliseront que quelques années avant que leur gabarit n'impose un autre accès. La haie n'a pas repoussé pour autant. En train de jouer c'est papa, son père est au premier plan et comme d'habitude je ne sais pas qui sont les autres.

Le papa de mon papa, Antoine.

Je crois qu'il est né en 1903. Il a eu un parcours bizarre, mi-citadin mi-rural. Originaire de Haute-Savoie et d'une ferme construite par la famille vers 1900 il a dû se retrouver face à une exploitation impossible à faire tourner vu l'absence d'hommes murs en bonne santé. Il s'est tourné vers le métier de "mécanicien dentiste" (maintenant on dit prothésiste dentaire) à une époque ou le "traitement" standard des maux de dents était l'arrachage pur et simple. Je pense que c'est parti en vrille en même temps que son mariage et il est revenu dans la Yaute pour des travaux nettement plus physiques. Il a participé à la construction des barrages de Génissiat et de Seyssel (le plancher de la salle commune de la ferme était formé de planches de coffrage récupérées à Génissiat). Je crains que le travail sur les chantiers n'ait pas fait de bien à sa tendance à picoler et il en est mort en 1968. 

J'ai assez peu de souvenir avec lui. Je le revois en train de dépiauter un lapin pour le repas et je me souviens d'une fois ou il voulait absolument me faire mon chocolat du matin à l'eau plutôt qu'avec le lait prévu pour. Je n'ai pas trouvé ça bon et je n'ai jamais retenté l'expérience.

D'une manière générale il était plus sensible à l'appel des bistrots de Seyssel qu'à la voie du sang et ses petits enfants le passionnaient moins que le gros rouge qui tache.

Été 1954. Il est le premier en bas sur l'escalier, je suis incapable de reconnaître les autres.

Soyons francs, avec la casquette je ne suis pas sûr de mon coup mais je pense que c'est lui. Je ne sais pas s'il est à coté de mon arrière grand père ou d'un arrière grand oncle.

Je me rappelle de ce vélo qui a pris la même direction que les photos des ancêtres. Il avait des jantes en bois et deux vitesses : Un grand braquet avec une roue libre, et, en bas des côtes on retournait la roue arrière pour un petit braquet en roue fixe. Facile facile.

Lyon 1932. Classe non ?

Pépé vers 1953 avec sa première petite fille Christiane dans les bras. Ca doit être au fond de son jardin.

Pendant qu'on est avec Christiane deux photos prises à Batna (en Algérie) où elle est née en 1953

à huit semaines (ça doit être le bébé de gauche)

et à un an

Mes deux grands parents ensemble (Rose et Antoine)   . Il était pas mal pépé à son époque "citadine"

Le frère de mémé Rose

Enfin, je le suppose car je ne l'ai jamais vu. Mémé avait coupé les ponts quand il avait pris sa carte du parti communiste (pour une grenouille de bénitier comme elle c'était impardonnable). Elle lui a quand même envoyé papa qui bien que trop jeune pour le STO était suffisamment "turbulent" pour risquer des ennuis avec les allemands (et les ennuis pouvaient être fort graves). Du coup, tonton a été mis à contribution pour mettre le neveu à l'abri dans un maquis (ce qui ne manquait pas à Oyonnax ou était établi mon grand oncle). De mouvements en mouvements, papa s'est retrouvé près de Belley ou il s'est engagé avec le reste du maquis dans la première armée française. Du coup, il a servi dans un régiment de tirailleurs marocains jusqu'à ce qu'il soit blessé vers Montbéliard. Je ne crois pas qu'il soit retourné au front après sa convalescence. Il voulait régulièrement nous faire sentir un bout de ferraille resté planté dans sa hanche droite. Je ne vous raconte pas l'enthousiasme suscité chez nous :-)

Là, ça devait être à la fin de 14-18 car je ne pense pas qu'il ait fait une carrière militaire.

Le chantier du barrage de Seyssel

Pas mal de photos sont manifestement prises pendant la construction du barrage de Seyssel sur lequel pépé travaillait comme dragueur. Il y a eu un accident lors d'une rupture de câble qui l'a laissé avec une jambe raide. Je mets aussi des photos de bistrot car je pense que ça devait être le repaire de son équipe de collègues. Comme je ne vois pas pépé sur les photos je suppose qu'il tenait l'appareil.

Le jeune qui est en train de faire remplir son verre c'est papa. Le serveur à un gros air avec pépé mais je ne suis pas sûr de mon coup. Le barrage ayant été construit à partir de 1947 papa avait 21 ans ou un peu plus. Je crois qu'il était dans une période un peu floue entre la convalescence de ses blessures de guerre et son réengagement dans la garde mobile. Je crains que la fin de sa scolarité ait été très perturbée par la guerre et son départ au maquis ce qui n'a pas du arranger les choses pour reprendre une vie normale à sa fin de la guerre..

 

Là, je pense que c'est plutôt le Rhône en amont du confluent avec les Usses, donc quelques kilomètres au-dessus du barrage de Seyssel. Pour ce que j'en sais, les parcelles de la famille se trouvaient dans le secteur ou je ne vois pas bien ce qu'on pouvait faire d'autre qu'un peu de vigne et faire paître des chèvres. Dans la légende familiale, les molasses ayant servi à la construction de la ferme ont été remontées "à temps perdu" par les gardiens (et gardiennes) des chèvres. Il y avait une grotte creusée dans la molasse qui était utilisé comme  abri pour les bêtes puis, plus tard, comme cellier avec une cuve maçonnée pour faire le vin. Je n'ai connu la cuve que bouchée par une pierre de quelques tonnes de molasse tombée du plafond et posée à plat sur le sommet de la cuve. Papa prétendait qu'il y avait eu une source au fond de la grotte mais je n'y ai jamais vu la moindre goutte d'eau

Mémé Rose

Toute seule sur ce portrait qu'elle a dû faire faire pour envoyer à papa quand nous étions en Afrique du Nord.

Vraiment pas sûr de mon coup mais je verrais bien une photo du Dr Vieille dans le jardin de Dannemarie.

Cousine Germaine

Une cousine de papa dont c'était le prénom. Elle est restée longtemps "vieille fille" comme on disait alors et ne s'est "casée" que sur le tard dans les années 1970-1980

Germaine, papa et je ne connais pas les deux autres

Pont de la Golette août 1933. Mémé Rose, probablement la "tante Calloud" (la mère de Germaine que je n'ai jamais connu que "très vieille") et Germaine

Il n'y a que Germaine que je reconnais et je ne vois pas bien dans quel coin situer la photo. Peut-être dans le haut du canyon du Rhône.

Une autre cousine

En souvenir de ta cousine zazou. Signé illisible. Il est certain que cette longueur de jupe ne devait pas faire un tabac chez les partisans du régime de Vichy pas vraiment réputés pour leur ouverture d'esprit.

Les autres

Sylvie Belleville, Antoine, illisible

??? la choucroute fait très années 1940

Tamponnée au verso "L.Malherbe-Photo 2 août 1948 Oyonnax (Ain)

???

???

La petite fille est aussi sur la photo de la partie de boules mais je n'ai pas la moindre idée de qui c'est